La santé mentale dans une situation critique à Oran
Alors que des dispositions ambiguës viennent d'être décidées
Le problème de la prise en charge psychiatrique semble constituer un véritable casse-tête pour les responsables du secteur de la santé à Oran. Malgré la mise en place d'une sous-direction de la santé mentale en 2000, la situation ne cesse d'empirer et de connaître des complications de plus en plus importantes. Les agressions et les violences des malades mentaux contre des passants sont légion à Oran. Un phénomène inquiétant qui s'accroît dans l'ensemble des zones de la wilaya d'Oran sans que des dispositions concrètes et efficientes soient prises par les responsables du secteur.
Prise en charge, de nouvelles dispositions
Selon des informations parues dans le bulletin interne d'information de la direction de la santé (DSP) d'Oran, de nouvelles dispositions ont été décidées concernant la prise en charge et l'hospitalisation des malades mentaux. Dans cette nouvelle perspective et afin d'endiguer ce fléau social inquiétant, le CHU d'Oran se voit ainsi attribuer de nouvelles missions consistant à procéder à l'évacuation et l'hospitalisation de ces malades mentaux «errants» aux services des urgences psychiatriques avant de les transférer à l'hôpital psychiatrique de Sidi Chahmi. Dans une seconde étape, les malades, dont la situation médicale est stabilisée, se verront transférer vers des établissements de repos comme Dar Errahma et ce, sur recommandation du wali ou du délégué à la sécurité, nous dit-on encore. Faut-il le noter, les institutions de Diar Errahma n'ont pas été conçues pour accueillir ou abriter pareilles catégories sociales, même si l'on prévoit des visites et des contrôles psychiatriques sur sites qui restent, toutefois, à prouver et à effectuer réellement. D'un autre côté, on de demande à propos de ceux qui ont proposé cette option s'ils ont pris en considération la quiétude des personnes du troisième âge, pensionnaires légitimes de ces établissements caritatifs.
Un accueil qui laisse à désirer
Parallèlement, la prise en charge de cette catégorie de malades souffre d'un manque à gagner considérable, étant donné que les structures chargées de cette mission se comptent sur le bout des doigts et ne sont pas en mesure de répondre à l'ampleur du mal croissant qui ronge la société algérienne. En effet, les familles des malades mentaux hospitalisés et ceux en consultation régulière dans les structures sanitaires de la wilaya déplorent «le mauvais traitement et l'accueil malveillant et dégradant réservés aux malades et à leurs accompagnateurs dans ces structures». A titre d'exemple, le secteur sanitaire d'Ibn Sina (ex-Victor Hugo) reste une illustration vivante de l'accueil réservé à cette frange de malades par la cellule psychiatrique, domiciliée dans une vieille église. Presque une centaine de malades mentaux transitent quotidiennement par cette structure spécialisée qui pour prendre ses médicaments qui pour effectuer sa consultation médicale mensuelle. Ces chiffres nous ont été donnés par le personnel soignant de cet établissement médical, qui n'a pas manqué de nous faire part «des difficultés et des conditions lamentables du travail et l'inadaptation de cette structure d'accueil» dans laquelle il exerce. Dans cet établissement qui a eu des précédents graves et des démêlés avec la justice suite à des vols suspects de psychotropes et autres produits dangereux, nous avons été témoins de scènes d'arrogance et de violences verbales et presque physiques à l'égard de certains malades et leurs proches venus les accompagner. Voulant comprendre cette situation insoutenable, nous avons demandé à l'infirmière qui était à l'origine de ces scènes de nous expliquer ce qui se passe. Elle se contentera de nous répondre que «les accompagnateurs représentent un grand problème pour ce centre de psychiatrie !». De son côté, une responsable au sein de la DSP estimera que «c'est un prétexte que de poser le problème des accompagnateurs étant donné que les malades mentaux ont besoin d'accompagnateurs et c'est obligatoire pour leur propre sécurité et celle des gens». Dans cette cacophonie sanitaire, le problème de la santé mentale a tendance à devenir plus grave et plus compliqué à Oran. Y a-t-il un responsable en la demeure ?
Mohamed Ouanezar
La Tribune
13 mars 2005