Colloque de la santé mentale en Algérie
« On ne peut avoir actuellement un niveau optimal de bien-être de l'individu à cause de la détérioration des conditions socio-économiques dans notre pays», ont affirmé des spécialistes, lors des travaux du quatrième colloque de santé mentale qui se sont déroulés, hier à l'ITSP. Mal-vie, chômage, problèmes familiaux, stress dans le travail et syndromes post-traumatiques liés aux événements de la dernière décennie, sont autant de facteurs conduisant à la détérioration de la santé mentale dans notre société. Le constat est alarmant.
Une dizaine de malades souffrant de divers troubles psychiques sont hospitalisés chaque jour à l'Etablissement hospitalier spécialisé (EHS) de Sidi Chahmi. Avec seulement une capacité d'accueil de 460 lits, cet établissement hospitalier reçoit des patients de toutes les wilayas de l'Ouest. «Nous sommes vraiment dépassés. Les moyens matériels et humains font énormément défaut et nous sommes réduits à travailler avec les moyens du bord», déplore Dr Djaoui, maître assistant à l'EHS de Sidi Chahmi. A titre d'exemple, le service de désintoxication de cet EHS, qui dispose seulement de 32 lits, est débordé. «La toxicomanie prend de l'ampleur dans notre société où elle touche de plus en plus les jeunes entre 14 et 16 ans.
Rien que pour ces quatre dernières années, environ 1.000 patients ont été traités au niveau de ce service», précise notre interlocuteur. Selon un autre spécialiste de cet établissement, le traitement de la toxicomanie est long, onéreux et le rétablissement reste incertain en raison du manque de moyens. Aussi, le nombre de toxicomanes récidivistes reste très important. «La prise en charge d'un patient coûte en moyenne 1.400 dinars par jour. Avec 14 milliards de centimes de budget annuel, on ne peut assurer une prise en charge totale (médicaments, habits, nourriture) pour nos 460 patients», affirme ce spécialiste.
Le déficit en personnel médical spécialisé est un autre handicap qui compromet la prise en charge des patients. L'établissement fonctionne actuellement avec sept spécialistes dont deux seulement sont des hospitalo-universitaires. Le nombre du personnel médical, tous corps confondus, est de 400. «On travaille dans une insécurité totale. Une seule infirmière assure la surveillance de 24 malades», déclare notre interlocuteur. L'établissement souffre également de la détérioration de ses infrastructures, de l'absence de l'alimentation en eau potable. «Notre établissement est devenu un dépotoir pour les patients ramassés dans les rues d'Oran. La santé mentale est une affaire politique. L'Etat est responsable de cette situation et il doit intervenir en urgence pour y remédier», souligne notre interlocuteur.
Sofiane M
Le Quotidien d'Oran
23 novembre 2005